Lundi 07, 13.04. Nous passons au dessus de Vienne. Dans un peu plus de deux heures, je serai à Istanbul. Ce n’est pas à moi qu’il faut convaincre, mais le hasard fait parfois bien les choses. Istanbul, sur le détroit du Bosphore. C’est là que je ferai la jonction avec Rose, pour que nous rejoignions ensemble la Malaisie. Se retrouver aux portes de l’Asie, aux confins de deux continents; joli symbole en vérité, et le genre de petites choses qui me met immédiatement en joie.


Comme cette fluidité matinale que j’ai éprouvé aujourd'hui, et qui tranche singulièrement avec mes habitudes quotidiennes. Le lever, la douche, le café, l’habillage. Tout était prêt, vêtements compris. Ne rien devoir chercher, juste, pour une fois, voire les choses s’enchaîner naturellement et profiter de cet instant de grâce. Le train, être sur le quai au moment où il arrive. Arriver à l’aéroport 20 petites minutes plus tard. Passer l’enregistrement. “Final destination please ? Kuala Lumpur” Au contrôle sécurité, aucune encombrement, pas de poches à vider, uniquement son sac et sa pochette ventrale à déposer. A la douane, dépasser une ligne de 300 personnes et se retrouver seul devant un portique hi-tech qui me libère en 40 secondes. Merci le passeport biométrique (ok, ça valait le coup de le refaire alors que l’ancien était encore valable). Sans accroc de bout en bout.


Bien sûr, je me suis préparé. Comme tous les jours. Mais pour une fois, cette agréable impression que cela paie. Peut-être que l’univers essaie de me dire que j’ai raison de partir en ballade.


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De retrouvailles, il donc fut donc question. Celles avec Rose, d'abord. Cocasses, pour tout dire: elle, tellement absorbée dans sa lecture que j'ai du l'appeler trois fois avant d'avoir son attention, moi presque enfermé dans la zone de transit à cause d'un mauvais aiguillage. Et de concert, découvrir que l’Europe a encore du chemin à faire en matière d’intégration. Pour les ressortissant français, bienvenue en Turquie sur simple présentation du passeport. Pour les amis belges, visa obligatoire pour entrer sur le territoire turc (et donc quitter l’aéroport). Soit, c’est donc parti pour le visa au pire rapport durée/prix du monde: 20 EUR pour 8H montre en main.


Je me suis vite rendu compte que ça en valait la peine. Sitôt libérés, Rose, forte de ses deux années vécues dans la ville, s’est révélée une excellente guide. Passage express à la Grande Mosquée Bleue et à la Basilique Sainte-Sophie, situées juste en face l’une de l’autre. Beaux symboles du côté multiculturel de la nouvelle Constantinople. Montée (pour ne pas dire escalade), à l’assaut de la Tour Genoise, où nous attendaient d’autres retrouvailles: celles de Rose et Ajda, l’une de ses anciennes collègues. Et qui furent célébrées d’un dîner dont je me refuse à publier les photos, tant elles ne lui rendaient pas hommage. Des feuilles de vignes farcies, goûtues et citronnées. Le meilleur halloumi grillé de toute ma vie. Puis un fromage crêtois en salade, un hoummous chaud, une purée de fêves à l’huile d’olive et un authentique tabouleh aux noix. Le tout accompagné d’un petit vin de pays bien frais, indispensable pour affronter la chaleur torride de la soirée. Bonheur simple, instant de grâce... Oui, la vie est bien difficile, parfois. (Mais j'ai encore le nom de l'endroit si vous êtes de passage dans la région). ;)


Et pour finir cette soirée presque parfaite, vint s'immiscer la tentation d’un hammam tardif. Mais le Dé en décida autrement, et ce fut finalement un cocktail sur les toits de la ville, avec pour décor une vue imprenable sur le Bosphore.

Et sur l’autre rive, juste sous nos yeux, l’Asie... L’Asie qui nous attendait, et que nous allions partir rejoindre le soir-même.


[A suivre: Chapitre 2 - Kuala l’Impure]